dimanche 22 août 2010

ELEMENT-TERRE

Notre mère la terre,

mater terra,

terre terre à terre, terrible ce son terre trois fois,

terra viva,

terra vividis,

terre silice,

terre milice,

terre militaire,

terre funéraire, alimentaire, élémentaire, aliment du limon,

terre, époux de la mer salée et épouse de la mère patrie,

terre matrice, Marie, et prince de ce monde pays, pouvoir, potentat et abus de vie personnelle,

terre une fois femme et trois fois fille :

terre (ter), trois fois fille d'un Dieu trinitaire,

terre d'Abraham et terre d'adoption, d'asile,

terre de locataires,

terra hominum,

terre de sel gemme : terre que j'aime... ?

Terre croûte dont Dieu a fait l'homme

qui s'y encroûte et s'y embaume,

terre souple où l'homme est un mobile qui voyage,

terre prêtée où l'homme est un indésirable exilé

à traites et à créances,

terre meuble où l'homme s'hypnotise en criant :

"place aux jeunes" !,

terre de mise en boîte et de mise en bière :

("il vaut mieux avoir de la bière dans le corps

que son corps dans la bière"),

terre de mise en demeure,

terre d'insectes où les moustiques se reproduisent l'été

comme si du ciel, ils tombaient des mouches,

terre moustiquaire où les moucherons naissent asticots et les papillons sortent de leur chrysalide pour s’envoler comme des âmes,

terre où l’homme fait l’âne pour avoir du son,

terre d'insecticides où la mortalité infantile précède l'avortement thérapeutique,

terre de morpions,

terre de morts et de pions,

terre que croient conquérir de triples pions

et que colonisent avec le mors aux dents

des cons braqués

sur le quant-à-àsoi de leurs nations

et de leurs cooptations,

terre de tartre,

terre de fissure, mais d'une seule nature et

qui jamais ne se désaxe,

jamais ne se balance,

jamais ne se casse la gueule,

jamais ne s'aère,

que jamais rien n'attire,

que jamais rien n'atterre,

que rien ne maintient non plus,

qui toujours s'en balance,

à laquelle ne tient rien et pas du tout son orbite,

mais qui a sagement choisi une fois pour toutes

une trajectoire à l'intérieur de celui-ci,

dans le cocon de l'elliptique,

trajectoire dont rien,

sinon l'explosion du soleil

qui fera d'elle des particules nucléaires

d'Hiroshima mon amour,

des particules élémentaires,

ne la fera dévier jamais,

terre d'orbite,

terre d'or que croient féconder des bites,

terre d'ordures,

terre de paillettes et de starlettes calcifiées,

terre où il est aussi DUR de s'enraciner que dans la pierre du coeur des stars,

terre offerte à la fossilisation des aristocrates armoriés,

terre où rien ne se plante puisque tout meurt,

est squelettique,

terre timide où tout est tumeur,

terre froide de congères

que gèrent des cons de propriétaires :

"Dans la tire à Dédé

J'en ai fait des virées,

Sur la terre à Dédé

J'en ai tiré des idées...

et pris des murges... à la coloniale...",

terre de baux commerciaux,

terre de piété,

terre de piétinement de l'idée fixe et de

résistance à l'attraction céleste,

terre de piraterie du mysticisme en croix,

terre où l'on ne peut pas être athée,

où il fait bon n'être pas bien,

où il fait bon dire qu'il ne fait pas bon vivre,

terre indécise entre hostilité et fertilité,

hospitalité et semonce de quitter les lieux,

terre en jachère où nos esprits méticuleusement mécanisés,

rationalisés,

mackdonaldisés,

contrariés dans leur influence sur les forces telluriques,

canalisés,

évacués,

se démagnétisent

et perdent leur empathie télépathique,

terre de canalisation et d'évacuation des esprits et des eaux usées,

à moins que l'esprit ne soit ingénieur,

terre usuraire,

terre lépreuse du "veux-tu guérir ?",

terre d'odeurs,

terre de prières,

terre d'où monte la bonne odeur des prières lépreuses et précaires,

terre aride et créée, come il existe un cinéma d'auteur,

terre à l'odeur de son Auteur-Créateur,

terre à vif,

terre avide

d'être sauvée par la racine,

terre qui tourne à vide et dans le vide et qui,

crée de rien, tourne en rond

en ne tournant pas rond,

terre friable, effroyable, mais qui jamais ne s'effrite en tant qu'entité,

comme le grès dont on fait les cathédrales

qu'on ne voit jamais s'écrouler,

terre à qui l'on prédit les plus grands malheurs,

les plus grandes catastrophes,

terre de parti pris pour la politique des partis de la terre et du pot,

terre à radiations systématiques, à clystères écologiques,

à effet de serre que provoquent les haleines-baleines

de nos poubelles à déchets,

machine terre détraquée par les pratiques culturales

hors-sol du lobby agricole,

terre que n'attiédit pas dans une pureté moelleuse

le voluptueux parfums de nos âmes,

terre frugale et de malnutrition arable,

terre en dent de scie :

terre de guerre où l'homme est le loup, où l'homme se nomme

de façon que ça ne pardonne pas et que ça canonne,

terre où il faut que l'homme pardonne à tout sauf à lui-même,

terre agraire et calcaire,

mais aussi terre comme fougère au bord de la rizière,

comme fougère qui ressemble à du riz entre nos doigts

quand on la traite comme un épis de blé:

"et si le grain de blé ne meurt..."

l’épi et la rizière au bord de la rivière,

le riz qui pousse dans la rivière

que la chinoise sans se noyer,

après avoir remonter sa robe

jusqu'en haut des cuisses,

passe toute sa journée à glaner,

vraie combattante du riz,

vraie Ruth conjugale et glaneuse,

terre entre placidité confuséenne et combat pour la vie,

terre en marécage sur laquelle afflue en marge l'eau

plus qu'elle n'y fait son lit :

"et comme on fait son lit, on se couche",

terre où les individus s'atomisent quand ils ne font pas clan,

terre d'alternative entre

instinct de conservation

de soi ou de l'espèce,

terre à qui on n'a pas demandé son avis pour être terre

et qui aurait dit non

si on le lui avait demandé

("mais il n'y a que les imbéciles

qui ne changent pas d'avis..."),

terre dont le refus de vivre a précédé celui de l'homme,

comme la catastrophe accidentelle et naturelle

a précédé l'incident ponctuel

du péché originel illégal,

terre de l'éphémère, de la mouche et du cobras,

terre des bras d'hommes, des dos de femmes et des bras de mer

qui ne se pendent pas autour du cou des marins, en mariées,

mais portent en charge les cailloux, les enfants

ou les îles,

terre allouée où tout est à charge

bien que la naissance d'un homme ne paraisse pas

augmenter ta masse,

terre j'y verse et giboyeuse à laquelle il faut donner chasse,

terre que l'on braconne,

de la sauvagerie du bestiaire

et de la gentillesse sans défense de la biche

qui, quand on l'a tuée, pleure comme un enfant,

terre castratrice avec ton exactitude d'aiguille,

terre desséchée,

terre pour qui l'on a décidé comme pour nous,

terre qui te crois au sommet de l'univers,

mais qui n'es comme nous

que le sommet de ton petit univers biologique,

terre incriminée, criblée et criminelle,

terre de la poudre dont on fait les balles,



terre... Es-tu salutaire ?



J'incline à le croire,

car il faut bien que j'aie les pieds sur toi

et que, pour assurer mon pas,

je fasse toujours,

comme si j'avais raison.

J'incline à le croire,

et même je l'espère,

ou je ne l'espère plus,

mais à la vérité,

je ne le distingue pas.



Agrée néanmoins les salutations distinguées



d'un enfant indistinct de toi,

même s’il manque de gratitude.



Julien WEINZAEPFLEN

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